Joanna Nowicki est Professeure des Universités en science de l’information et de la communication à l’Université de Cergy-Pontoise et collabore avec le Collège des ingénieurs dans le cadre d’un programme mis en place avec Sciences Po Paris. Ses thèmes de recherche portent sur la pensée européenne, l’autre francophonie, les aires culturelles et politiques, les transferts culturels, la communication politique Est/ouest.
Ce mois-ci, Joanna Nowicki nous fait l’honneur de nous exposer comment gérer une diversité de talents est devenu un des piliers à toute stratégie d’entreprise, et auquel Chargeurs accorde une importance primordiale.
« La diversité culturelle dans une organisation est une chance mais aussi un défi supplémentaire. Pour le relever avec succès, il est utile de commencer par prendre conscience de ce que l’anthropologue américain Edward Hall a résumé dans une phrase : « Le problème que j’ai avec l’Autre c’est le mien ».
En effet, nous sommes peu conscients à quel point notre moule culturel peut influencer, conditionner ou parfois déterminer certains de nos comportements, croyances, valeurs et certitudes. Partagés avec notre entourage et approuvés comme rationnels, normaux et adéquats, nous n’avons pas besoin de les remettre en cause. Jusqu’au moment où on est amené à agir en tête ou au sein d’équipes internationales. La confrontation avec la différence peut être plaisante (la nouveauté, l’exotisme et la curiosité étant le moteur naturel de l’ouverture), mais lorsque les enjeux d’efficacité, de management des équipes ou d’exercice des responsabilités ne vont plus de soi, la nécessité de la prise en compte de l’interculturalité s’impose.
Après avoir pris conscience que notre culture peut être analysée à l’aide d’une grille faite avec les outils qui existent de décryptage des modèles culturels, nous sommes mieux armés pour décrire, et ensuite comprendre les comportements, les croyances et les certitudes des collègues, partenaires ou dirigeants venus d’autres horizons. Car tout peut être expliqué, y compris les préjugés, les stéréotypes, les réflexes incompréhensibles lorsque ce travail d’analyse est fait avec l’expertise et avec l’apport des expériences partagées.
Il vaut toujours mieux anticiper l’émergence de conflits interculturels, bien plus difficiles à traiter, en préparant les acteurs à une confrontation, toujours complexe, avec l’altérité. On peut par exemple utiliser les étonnements, les incommunications et les malentendus inévitables pour en faire une opportunité d’analyse de la diversité d’apports, de talents et de visions au service de l’action commune. »